Herbjorg Wassmo, Cent ans, Gaïa Editions, 2011

Après avoir découvert cette auteure norvégienne en lisant Le livre de Dina (voir mon commentaire du 21 juillet 2012)-une lecture qui m’a envoûtée-, je suis ravie que ma récente inscription au comité de lecture de la médiathèque de mon quartier, m’ait permis de parcourir ce livre (que par ailleurs, j’avais déjà repéré comme une future lecture).

C’est à un voyage dans le temps que nous invite Herbjørg Wassmo : Cent ans retrace, en effet, une partie de son histoire familiale en évoquant les destins successifs et mêlés de son arrière-grand-mère, Sara Susanne, puis d’Elida, sa grand-mère,  et enfin de sa propre mère Hjødis. Quelques passages dépeignent aussi son enfance ; une enfance menacée par lui, son père, dont les actes répréhensibles se devinent, effleurés mais non détaillés par l’auteure, pudique.

De fait, le récit s’attarde essentiellement sur le destin de Sara Suzanne, mariée malgré elle à un homme, fou amoureux lui, Johannes, en l’an de grâce 1862.

Bientôt elle passe du statut de jeune mariée à celui de la mère d’une vaste « couvée », harassée, aspirant souvent à une autre vie. Mais le temps s’égrène, les saisons, les naissances défilent. Certaines rencontres marquent son cœur (et sa chair) au fer rouge : le pasteur Jensen, et même un certain Benjamin, fils de l’indomptable Dina…

Puis il y a l’évocation de la vie de femme d’Elida, qui elle a choisi son époux, malgré l’opposition de sa mère : il s’appelle Frederik et c’est un doux rêveur, perdu dans un univers rude où le pragmatisme est une nécessité. Il est malheureusement atteint d’une maladie cardiaque, mais cela ne les empêchera pas de fonder eux aussi une bien grande famille puisque Elida va mettre au monde dix enfants...dont la petite Højdis qui croira rencontrer l’homme de sa vie, Hans, dans la tourmente de la seconde guerre mondiale.

Découpé sous forme de « cahiers » plutôt que de chapitres, sans doute en référence à ceux que Herbjørb Wassmo remplissait de ses mots de petite fille solitaire et qu’elle cachait aux yeux de tous (et surtout aux siens à lui), le récit passe d’une « héroïne » à l’autre, entremêlant les époques et les événements. Au risque que parfois le lecteur s’y perde un peu…

Toutefois, la puissance de son expression emporte tout, nous accroche dans son sillage comme un cotre (bateau de pêche très utilisé le long des côtes de Norvège). Et si cette remontée dans le temps, cette immersion dans l’histoire familiale romancée de l’auteure, n’a pas le lyrisme sensuel et passionnel déployé dans Le livre de Dina, il n’en reste pas moins un récit fort, plein d’émotions : certaines douces et d’autres qui égratignent…