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L'aventure des mots
5 juin 2011

Vincent Message, Les veilleurs, Points, 2010

Veilleurs_CouvpocheVertigineux ! Il s’agit là sans conteste du meilleur roman que j’ai lu (dévoré en réalité !) depuis des mois !

Entre thriller et fantastique, monde « réel » et monde « onirique », ce livre nous emporte littéralement dans l’univers très particulier imaginé par Vincent Message, à la lisière du nôtre, si matérialiste, jamais très loin des aspects les plus pendables de nos sociétés modernes, toujours nuancé par une touche d’humour, de philosophie…Avec un vrai suspens en prime qui nous tient vraiment en haleine de la première jusqu’à la dernière ligne !

Nous partageons ainsi la vie, pendant quelques semaines, des trois principaux personnages : il y a Oscar Nexus, autour duquel toute l’intrigue se noue et se déroule (c’est un assassin puisqu’il a tué trois personnes dans la rue, un beau matin, sans raison apparente, et a poussé le vice jusqu’à s’endormir sur leur cadavre…à moins qu’il ne soit vraiment qu’un être perdu entre deux mondes, un pont  entre les deux…réalité ou manipulation), puis il y a cet ancien flic, Paulus Rilviero,  commandité pour démasquer ce qui ressemble beaucoup à un coup monté (la maîtresse du gouverneur faisant partie des victimes) et enfin, le docteur Traumfreund, psychiatre, dont Nexus, reconnu non responsable de ses actes, devient de fait le patient.

Et ces trois là vont tenter une expérience (sur la base d’une idée du psychiatre, bien sûr) et se retrouver isolés dans un étrange bâtiment appelé l’Aneph, loin de tout, dans le massif des Rodhiles.

Après les manœuvres d’approche pour obtenir la confiance de leur « patient-prisonnier », Rilviero et Traumfreund vont découvrir peu à peu le secret  de Nexus et les choses ne seront plus jamais les mêmes pour aucun d’entre eux !

A couper le souffle !

Sans oublier que pour son premier roman, l’auteur fait preuve d’une grande maîtrise de la langue et de l’écriture. Un vrai régal !

Pour vous donner un avant goût (surtout pour celles et ceux qui ne l’ont pas encore lu),  voici un petit extrait :

« En ce 2 octobre lumineux, l’horloge universelle marque quinze heures, trente-cinq minutes et douze secondes lorsque Rilviero voit l’Aneph pour la première fois. C’est au détour d’un virage, un impossible éblouissement. Le soleil a beau se trouver dans leur dos, soudain on ne voit plus rien. Qu’est ce que c’est que ce truc là ? pense-t-il en associant à cette question de bon sens certains de ses meilleurs jurons. Ne pas dévier de la route d’abord. Ralentir et serrer sa droite, même si ça fait bien dix minutes qu’on n’a croisé personne. Il baisse le pare-soleil, met sa main en visière. Traumfreund ne peut pas s’empêcher d’y voir le geste du marin qui touche au but et plisse les yeux pour préciser la ligne floue à l’horizon. Là-bas, un soleil s’est posé sur la terre ou plane à quelques mètres au-dessus d’elle. On ne voit plus que lui. Ce nouveau corps astral réverbère la lumière du soleil habituel et lance à l’assaut de la montagne une horde de rayons qui embrasent tout sur leur passage et plantent dans leur rétine leur étendard en forme de crinière, une tache sombre bordée de feu. La forêt redouble d’automne. Sous les ricochets de la lumière, la grisaille des rochers se transforme en or mat et le pierrier en une plage où le moindre caillou se charge d’incandescence. Le premier éblouissement passé, le regard s’accommode vite et Rilviero peut bientôt distinguer la voilure qui se déploie dans un repli du terrain au-dessus du pierrier. Les rayons du soleil sont membres de l’équipage, ils s’activent dans les hauteurs, glissent avec agilité d’une vergue à l’autre ; le vent fait vibrer les cordages de métal et les centaines d’hélices qui s’y trouvent accrochées. Les sons tantôt plaintifs, tantôt flûtés qu’il en tire rappellent ceux de ces instruments baroques qu’on connaît encore mais on ne joue plus. A mesure qu’ils avancent, l’effet de réverbération s’estompe. Rilviero continue de conduire en silence, sans se laisser perturber par cette apparition. La coque blanche effilée s’enfonce dans la montagne comme elle le ferait dans l’eau, une gigantesque dalle de pierre lui sert de ligne de flottaison ; du mât central part un réseau formidable de filins et de poutrelles d’acier soutenant les grands panneaux solaires. Traumfreund ne dit rien non plus. Le vent s’est tu. Ils approchent de ce monstre marin venu ajouter aux légendes des Rodhiles une histoire d’océan, de ce vaisseau paradoxal, de ce bateau de pierres blanches échoué toutes voiles dehors au dessus du grand pierrier gris ».         

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