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L'aventure des mots
30 juillet 2010

Michelle Perrot, Histoire de chambres, La librairie du XXIe siècle, Seuil, 2009

9782020892797Les chambres, la chambre, dans tous ses états à travers les âges (de l’Antiquité jusqu’à nos jours) dans la civilisation occidentale…La chambre où l’on naît, où l’on dort, où se déroulent les ébats amoureux ou simplement sexuels, où l’on lit, on écrit, on se réfugie, on se cache, on fuit le monde et le monde vous fuit, on s’enferme (ou on est enfermé), on se perd, on rêve, on médite, on est alité, on souffre, on meurt…

Mais attention, ce n’est pas aussi simple : la chambre et son intimité, c’est aussi le fruit d’une longue et lente évolution de la pièce commune, avec parfois une simple paillasse dans un coin, entassés à plusieurs dessus, en passant par le dortoir également bondé où la cohabitation dans un même lit (même pour les malades ! toutes affections confondues) est aussi de mise, voire une petite place sous l’escalier…

La « chambre », comme nous le démontre Michelle Perrot, correspond à son époque ! Elle devient une quête pour des raisons de liberté (celui ou celle qui a enfin sa chambre et peut en fermer la porte pour s’isoler), liée à l’intimité, incontournable, mais pas toujours acquise, des valeurs hygiénistes (les conditions sont longtemps lamentables : le peu de soin apporté aux corps et au linge, la vermine, la promiscuité, l’eau courante qui n’existait pas et qui mettra du temps à devenir la norme…).

Pour certains, la chambre est un lieu de création : beaucoup d’écrivains féminins et masculins y ont conçu leurs œuvres (Georges Sand, Proust…). Pour d’autres, elle est une forme de prison, de symbole bourgeois, de vie conventionnelle (Simone de Beauvoir –seulement durant quelques années- et Jean-Paul Sartre). Elle est aussi une prison quand elle est conçue sous forme de cellule pénitentiaire (bien que la connotation de « chambre » en soit bannie pour éviter toute forme d’appropriation, de confort ou d’intimité, justement !).

En tout cas, voici un ouvrage érudit, qui nous apprend vraiment beaucoup sur les évolutions de notre société occidentale (l’auteur signale son regret de ne pas avoir pu traiter ce sujet, du point de vue de l’Orient, voire l’Extrême-Orient…)

A noter qu’il paraît toutefois que la tendance aujourd’hui serait à la désintégration de l’espace entre les quatre murs solides de la chambre (un comble après des siècles mis à la construire), s’ouvrant sans « rempart » sur la salle de bain ou la pièce à vivre par excellence qu’est le salon/salle à manger…que ce lieu, si fréquenté par les femmes au XIXe et au XXe siècles, plongées dans une passionnante lecture, à l’abri des regards, allongée, voire vautrée sur son lit, tendrait à perdre cette fonction ?

Pas pour moi en tout cas qui apprécie toujours autant cette habitude « désuète » !

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