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L'aventure des mots
2 juillet 2012

Casanova, Mémoire de Venise, Les grands classiques de la littérature libertine, Le Monde, Editions Garnier, 2010

casanova mémoires de venise

C’est dans une librairie française au cœur de Venise, que j’ai fait l’acquisition de ce recueil, tout vêtu de rouge et laissant fort habilement l’œil saisir un détail coquin de Hercule et la reine de Lydie, Omphale, peint par François Boucher : la main du héros qui s’empare avec avidité d’un sein de la belle reine…

Il regroupe plusieurs chapitres extraits des mémoires du célèbre séducteur, amoureux des femmes, du jeu et de la liberté. Nous le suivons ainsi depuis son retour à Venise à l’âge de 17 ans après deux années d’étude à Padoue jusqu’à sa spectaculaire évasion de la terrible prison de Venise, surnommée Les plombs (pour les plaques de plomb qui couvraient ses toits).

Nous découvrons ainsi une vie riche, digne des plus grands romans d’aventure (aventures essentiellement amoureuses, il est vrai) dans une Venise de la première moitié du XVIIIe siècle, s’adonnant à la fête, à de nombreux divertissements, au libertinage, mais sur laquelle règne également la main de fer de l’Inquisition…

Une Inquisition que Casanova irrite, lui qui ne souhaite faire preuve que de ses qualités d’homme d’esprit dans le monde et de grand amant auprès la gente féminine... lui qui n’aspire qu’à vivre et agir en être libre, maître de ses choix et de son destin.

Car si ce recueil évoque sans fard ses exploits dans les alcôves, ses mémoires ne se résument pas à cela et c’est en chantre de la liberté aussi que Casanova restitue sa vision de la vie.

Extrait : « La fortune, qui se plut à me donner un échantillon de son caprice despotique en me rendant heureux par un chemin inconnu à la sagesse, n’eut pas le pouvoir de me faire embrasser un système de modération et de prudence qui aurait pu assurer solidement mon avenir.

Mon caractère ardent, mon inclination irrésistible au plaisir et mon invincible amour de l’indépendance ne me permettaient guère de m’imposer la gêne de la modération (…). Aussi commençai-je à vivre indépendant de tout ce qui pouvait mettre des bornes à mes inclinations, et respectant les lois, je crus pouvoir me mettre au-dessus de tous les préjugés.

Je croyais pouvoir vivre en parfaite liberté dans un pays soumis à un gouvernement entièrement aristocratique ; mais je me serais trompé quand bien même la fortune m’aurait fait devenir membre du gouvernement ; car la république de Venise, reconnaissant que son premier devoir est de se conserver, se trouve elle-même esclave de l’impérieuse raison d’Etat. Elle doit, au besoin, tout sacrifier à ce devoir, à l’égard duquel les lois mêmes cessent d’être inviolables.

Mais quittons cette matière désormais trop connue ; car le genre humain, en Europe au moins, est persuadé que la liberté sans bornes n’est compatible nulle part avec l’état social. Je n’ai effleuré cette matière que pour donner au lecteur une idée de ma conduite dans ma patrie, où je commençais cette année-là à battre un sentier qui devait aboutir à une prison d’Etat, impénétrable par cela même qu’elle était inconstitutionnelle. 

Assez riche, doué par la nature d’un extérieur agréable et imposant, joueur déterminé, vrai panier percé, grand parleur toujours tranchant, rien moins que modeste, intrépide, courant les jolies femmes, supplantant des rivaux, ne connaissant pour bonne compagnie que celle qui me divertissait, je ne pouvais être que haï ; mais toujours prêt à payer de ma personne, je me croyais tout permis … » ;

Ainsi se décrit Casanova, ainsi en allait-il de sa conception de l’existence…

Don Juan, personnage fictif, dont il a été le modèle, ne peut être qu’un pâle reflet de ce personnage d’exception.

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