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L'aventure des mots
4 avril 2010

Cormac Mac Carthy, La route, Points, 2009

la routeIl reste les cendres, partout, dans l’eau de pluie, dans la neige, couvrant le sol, couvrant toute chose. Il reste aussi une lumière qui n’est plus que l’ombre d’elle-même, une obscurité opaque, presque solide. Il reste, en outre, quelques êtres humains (très peu d’autres formes de vie) qui errent à la poursuite de leur propre survie, même si elle dépend de la chair des autres survivants.

Il reste surtout un père et son fils qui avancent le long d’une route, avec le mince, très mince espoir d’arriver à l’océan et de dénicher dans les restes de notre monde englouti une lueur d’espoir pour un avenir qui n’est peut-être qu’un rêve. 

J’ai conscience que d’avoir lu ce livre, n’a rien de très original : tant d’autres lecteurs l’ont fait avant moi et tant de spectateurs seront sans doute aller voir le film…et après tous les commentaires déjà écrits, les discussions partagés sur le sujet, mon avis sur la question, n’a pas la prétention d’apporter un nouveau point de vue.

Mais c’est la première fois, dans le lot de mes diverses lectures, qu’un livre me laisse une telle impression : l’auteur a réussi l’exploit, je trouve, de rendre palpable, tangible le vide. L’auteur lui donne une incroyable substance.

Ce que traversent l’homme et l’enfant, c’est un monde moribond, avec ses terres dévastés, ses fleuves ou autres cours d’eau noir de cendres, pollués, intoxiqués, ses villes, bourgs ou maisons isolées, en ruine, ses habitants, soit momifiés, torturés, dévorés, bêtes traquées, soit prédateurs sans pitié, malades, fous, dévoreurs d’enfants, tels les ogres de contes de fée…Dans leurs yeux, il n’y a plus rien d’humain. Il n’y a que le vide (aussi parfois la peur, peut-être…).

Les paysages sont gris, mornes. Il fait froid. Seul subsiste le feu dont l’homme dit à l’enfant, qu’il en est le porteur et en quelque sorte, le gardien. Au-delà du petit cercle de chaleur que procure le feu, il n’y a toujours que le vide. D’autant plus réel que l’obscurité couvre tout durant de longues heures interminables.

L’écriture est sèche, sans fioritures. Les étapes qui constituent le parcours des deux principaux  personnages se succèdent avec une certaine monotonie qui nourrit elle aussi le sentiment désespérant du vide, sidéral. Ils rencontrent assez peu de leurs congénères, et cela finit toujours mal…sauf pour la toute dernière étape que fera l’enfant.

 

Extrait : «  Dans le long crépuscule gris, ils traversèrent une rivière et firent halte et regardèrent penchés sur le parapet de ciment le lent flot d’eau morte qui passait en dessous. En aval sur le linceul de suie comme sur du papier noir transparent, les contours d’une ville incendiée. Ils la revirent juste à la tombée de la nuit tandis qu’ils poussaient le lourd caddie sur une longue côte et ils s’arrêtèrent pour se reposer et il tourna le caddie en travers de la route pour l’empêcher de rouler. Leurs masques étaient déjà gris sur leurs bouches et leurs yeux cernés de noir profondément enfoncés. Ils s’assirent dans les cendres au bord de la route et regardèrent au loin vers l’est là où la forme de la ville disparaissait dans la nuit tombante. Ils ne voyaient aucune lumière. »

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