Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
L'aventure des mots
26 novembre 2009

Olivier Adam, Des vents contraires, Editions de l’Olivier, 2009

vents contrairesAvec cet ouvrage, j’ai retrouvé le style âpre, bien que parfois presque poétique, de M. Olivier Adam. J’avais aimé A l’abri de rien, je crois bien avoir préféré ce dernier opus.

Le pire se produit, mais ce qui est raconté là est loin des grands mouvements émotionnels et romanesques. C’est le quotidien qui est décrit, la difficulté à continuer à mettre un pied devant l’autre, à affronter même les petits rien de la vie de tous les jours. Le « héros », Paul Anderen, et ses enfants, Clément et Manon, nous sont familiers, si proches…Tout ce qu’ils traversent, fait écho à ce que nous redoutons : la disparition inexpliquée et brutale d’un être aimé, indispensable à bonne marche de notre existence ordinaire, parfois si douce, parfois si amère, mais c’est la substance même de la vie…Alors quand il n’en reste qu’une ombre, un fantôme éthéré, comment survit-on ? Pire encore, quand l’espoir s’évanouit à jamais, englouti par une horrible vérité, que deviennent ceux qui sont toujours là ? La blessure guérit-elle, rien qu’un peu ?

Pour Paul, nous ne le saurons pas. Mais il survivra pour ses enfants, non ?

Sombre, presque glauque, tant dans ce livre tous les personnages sont à la dérive, incroyable pour les descriptions des sensations physiques et mentales, …et pour celles des paysages marins, des intempéries de l’hiver qui font un décor hallucinant à ce roman…

 

Extrait : « Mes pas résonnaient sous mon crâne, s’enfonçaient dans la terre spongieuse des sentiers. J’ai mâché des herbes, goûté la terre, sucé des cailloux. J’ai pensé aux enfants, ils étaient à l’école et me manquaient, comme Thomas ils frayaient dans le noir, et rien ne s’allumait jamais vraiment. Ces derniers jours je les avais sentis s’engluer, l’illusion du renouveau avait fait long feu, Clément arborait en toute circonstance un visage égal et indifférent, et quoi que le lui propose, partie de football ou de cerf-volant, aquarium tortue géante et requin blanc, me gratifiait d’un haussement d’épaules. Quant à Manon elle ne quittait plus mon lit, refusait de s’endormir dans sa chambre et lorsque le la glissait dans ses draps, se réveillait en hurlant. Je veillais toute la nuit sur son sommeil, elle pleurait tout en dormant. Le chemin glissait le long de la falaise, par les rochers on gagnait le sable et les voiliers à fond de cale. J’en ai choisi un blanc et bleu. Mes pieds s’enfonçaient dans la vase et dans certains creux, l’eau m’arrivait jusqu’au mollet. Je me suis hissé sur le pont, la cabine était ouverte et minuscule, j’ai sorti la bouteille de la poche de mon manteau et je l’ai vidée allongé sur la banquette. Des hublots étroits j’apercevais le désert de sable et l’embouchure du havre. La pluie avait cessé et la lumière jaune mangeait le ciel noir en surplomb des eaux vert-de-gris. J’ai fermé les yeux sans dormir et j’ai attendu. Que la marée me prenne et m’emporte. De temps en temps j’y jetais un œil, je la voyais progresser. Bientôt j’ai senti le bateau s’élever. Il voguait immobile et cerné de toutes parts, un vent calme faisait tinter les filins d’acier le long du mât. Douces comme de la soie, les vagues faisaient mine de m’emporter. Dans quatre ou cinq heures elles me déposeraient sur le sable et j’aurais le sentiment d’une traversée. ». 

 

Publicité
Publicité
Commentaires
L'aventure des mots
Publicité
Publicité