Irène Némirovsky, Suite française, Folio, Editions Denoël, 2004
Irène Némirovsky, assassinée par les nazis, décrit dans ce livre –le dernier qu’elle ait pu écrire avant d’être arrêtée, puis déportée- l’exode de juin 1940 et l’occupation qui a suivi. Le récit nous mène jusqu’à la fin de l’année 1941, avec la déclaration de guerre entre l’Allemagne et la Russie.
En fait, c’est à travers les yeux de différents personnages que nous suivons ces événements, de modestes employés de banque à l’amateur d’art parisien, de jeunes fermiers à l’aristocratie campagnarde, de la couturière aux mœurs légères à la bourgeoisie locale soumise au carcan de ses préjugés, du soldat français en fuite à l’officier allemand…
Le regard de l’auteur, lui, est acerbe, d’une acuité qui va dénicher chez ses personnages toutes les petites bassesses, toutes les mesquineries, toutes les lâchetés, tous les désespoirs aussi. Elle met particulièrement l’accent sur le mépris que ressentent les exilés les uns envers les autres, bousculés, entraînés malgré eux sur la route de l’exode, obligés de se côtoyer…
Puis vient la cohabitation avec l’occupant, la confrontation dans la vie quotidienne avec un ennemi pas si monstrueux que ça…monstres à visages humains ou humains par la guerre rendus monstrueux qu’il soit d’un bord ou de l’autre… ?
Irène Némirovsky brosse ainsi un tableau saisissant de la nature humaine, la peur révélant souvent sa part la plus obscure…